Partir pour longtemps, ailleurs

6 septembre 2018
par Justine Morasse

Résumer une expérience aussi riche qu’un stage à l’étranger, en quelques lignes, est un exercice de synthèse et de réflexion difficile, certes, mais nécessaire. Toutefois, la partager et permettre à plusieurs de la vivre avec moi, à travers mes mots, est un processus que je vis pour la première fois et qui m’intimide.

J’en suis à presque un an à l’étranger. J’en suis à mon second mandat à Comas, au Pérou. J’en suis à mon troisième séjour prolongé hors du Canada. J’ai fait plus de quatre voyages dans ma vie. Pourtant, après tout ce temps loin de chez moi, loin de mes proches, sans domicile fixe, de relations à distance, de sacrifices, d’insécurité financière et de doutes, jamais je ne me suis sentie plus complète.

« Pour être heureux, tous les chemins mènent à Rome. »

Partir pour longtemps, ailleurs, loin, découvrir le monde est une étape dans ma vie qui m’a permis de réaliser plusieurs choses. L’homme (la femme) évolue différemment selon le contexte, mais cherche profondément à être heureux. Pour être heureux, tous les chemins mènent à Rome. Certains vont jouer au futbol le mardi soir, d’autres vont se donner corps et âme pour une cause pour faire une différence et enfin, certains vont s’entourer de gens, d’animaux, de plantes. L’expérience dans laquelle je me trouve m’apprend à être heureuse, à trouver le bonheur là où il semble impossible à atteindre.

Les relations avec les gens, bien que complexes à certains moments, font partie des choses qui m’ont permis de trouver un bout de soleil sous le ciel gris de l’hiver péruvien. Habitués à recevoir des gringas, les incompréhensions, les frustrations, les difficultés sont abordées avec patience et douceur. Les petits bobos et maladies de bedon sont pris en charge et réglés rapidement. Le bien-être est la priorité. Les accrochages arrivent, c’est la vie, il faut s’adapter.

L’adaptation, l’éternel défi, la priorité et le processus, le chemin à parcourir et le résultat. Jamais je ne serai Péruvienne, mais plus jamais je ne serai que Canadienne. Je m’adapte, et ce, depuis plusieurs mois à toute sorte de choses. La bouffe avec tous les féculents possibles dans la même assiette, les bisous sur une joue seulement, CHAQUE fois que tu entre ou sors de chez quelqu’un, le froid qui, bien sûr, est la cause directe de l’indigestion. Il y a aussi le temps qu’on prend pour comprendre l’autre, le temps qu’on a pour arriver en retard, le temps qu’on a pour tout, ça devient enivrant de prendre son temps.

« L’adaptation, l’éternel défi, la priorité et le processus, le chemin à parcourir et le résultat. »

Le temps, quand on parle de relations humaines, c’est notre allié, quand on parle de mandats de stages, c’est une autre histoire. Comment gérer son temps, quand, autour de soi, les rendez-vous s’annulent, s’accumulent, se changent? Comment gérer son rythme de travail quand trois entités: le Canada, le Pérou et soi-même, le teintent? On revient à l’adaptation, à la frustration, mais aussi à la découverte de la futilité de l’urgence. L’humain prime sur la productivité, et non le contraire, et c’est beau. C’est beau d’être humain dans une société d’humains.

Cet humain, complexe et différent de l’autre, s’il se retrouve sans règle, loi, cadre, peut engendrer un chaos. Un chaos de bruits, d’odeurs, de couleurs. Un chaos qui, à première vue, n’a aucun sens, qui engendre détresse, perte et difficulté. Pourtant, quand on passe par-dessus l’humanité crue et laide de ce chaos, on découvre un commerçant à qui on est fidèle et qui nous donne une pomme de plus, on découvre une voisine qui t’invite à une fête, on découvre une partie de la ville sans vrai route qui cache un terrain de soccer synthétique identique à celui à la maison. Se plonger dans ce chaos, ça fait peur, vraiment peur, mais ce saut en bungee avec ou sans élastique donne des ailes.

Cette expérience, longue pour certains, trop courte pour d’autres, me donne un nouveau regard sur les aspects les plus simples de la vie. Elle me donne une capacité d’analyse, une perspective qui ne change pas le monde, mais au moins qui me permet de le voir différemment.

Justine Morasse

Stagiaire du Programme de stages professionnels pour les jeunes
Pérou, été 2018

Le programme de stages professionnels pour les jeunes est rendu possible grâce au soutien du Gouvernement du Canada.

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