Ji-Yan Séguin – Stage mali 2015

11 novembre 2016
par Ji-Yan Séguin

J’ai appris que je devais faire un rapport de stage pour le CSI dans lequel je devais décrire un événement marquant de ma vie au Mali. Un événement marquant… mais c’est quoi ça? Une histoire avec une certaine morale destinée aux prochains stagiaires? Un bilan de mes apprentissages? Quelque chose qui souligne les aspects culturels d’un autre pays? On peut facilement s’y perdre là-dedans. Pour ma part, je crois bien que j’opterai pour la simplicité.

Bien des choses m’ont marquées durant ce voyage. À bien y penser, j’aurais pu vous parler des paysages, des activités en lien avec le mandat ou bien des gaffes que j’ai commises sans le vouloir et dues à des différences culturelles. Je choisis toutefois de vous parler de ce qui me paraît le plus essentiel : les gens. Ce n’est donc pas un événement en tant que tel, mais bien une série de moments privilégiés qui font en sorte que c’est ce que je retiens du Mali. Bâtir des relations est à la base une tâche complexe pour l’homme. Bâtir des relations avec des gens appartenant à une réalité différente de la vôtre, et avec comme obstacle premier une barrière linguistique que je qualifierais d’assez importante, augmente d’un cran la difficulté de tout ça. J’ai appris à apprivoiser mes frères. J’ai appris à lire le non-verbal. J’ai appris à reconnaître ce que dégagent les gens et à voir ce qui est bon sans que des mots ne soient prononcés.

Chaque jour, chacun faisait son petit effort de plus pour qu’on se rejoigne au milieu…

Quand je suis arrivée, ils me regardaient de loin. J’étais étrange pour eux, sortie d’un autre monde. Je parlais autant bambara qu’eux ne parlaient le français, c’est-à-dire l’équivalent du « yes, no, toaster»  anglophone. Puis, le temps a passé. Chaque jour, chacun faisait son petit effort de plus pour qu’on se rejoigne au milieu : un sourire de plus, un conseil marmonné, une invitation à essayer une nouvelle activité, une minute de plus de conversation. Vers la fin, je passais toutes mes soirées avec eux. On se comprenait du mieux qu’on le pouvait, soit par un mélange de français-bambara-mime. C’était beau à voir. Durant nos multiples discussions, certains sujets revenaient souvent. Il y a de ces choses qui préoccupent tout le monde peu importe où est-ce que tu te trouves sur la planète. Les relations hommes-femmes en sont un bon exemple. On a beaucoup parlé, comme quoi nous essayions d’être égalitaires ici et que là-bas, c’était très différent et que la violence conjugale était parfois banalisée. À chaque fois que cela arrivait, je leur répétais qu’il fallait faire attention aux dames. À la fin du voyage, les émotions plein le ventre, j’ai essayé de leur communiquer mes bénédictions pour l’avenir. Je leur ai souhaité la santé, le bonheur. À la fin, un d’eux m’a dit qu’il n’allait « pas frapper les femmes, parce que valeur connaît »… Voilà, c’était mon moment marquant.

Le Mali et mes frères m’ont beaucoup appris. Ils m’ont appris à être forte, à être ouverte et à chercher à comprendre mon prochain, à me respecter et à mettre mon pied à terre selon mes convictions. Mes frères m’auront endurcie et j’espère de mon côté avoir su les adoucir un peu.